SM le Roi Mohammed VI adresse un message à la Conférence internationale de Doha sur le financement du développement

Doha le 30/11/2008

Voici le texte intégral de ce message dont lecture a été donnée dimanche par le Premier ministre, M. Abbas El fassi qui représente le Souverain à cette manifestation internationale.

"Louange à Dieu,.

Prière et salut sur le Prophète, Sa famille et Ses compagnons.

Monsieur le Président,.

Majestés, Altesses, Excellences,.

Mesdames et Messieurs,.

Il M'est agréable d'adresser, tout d'abord, l'expression la plus sincère de remerciements et d'estime à Mon Cher Frère, Son Altesse Cheikh Hamad Ben Khalifa Al-Thani, Emir de l'Etat du Qatar, qui a mis en place les conditions nécessaires à la réussite de cette importante rencontre. Je tiens également à rendre hommage à l'Etat frère du Qatar pour le rô le majeur qu'il joue au sein de la communauté internationale, surtout dans le domaine du soutien apporté au développement.

Nous nous réunissons aujourd'hui dans un contexte international délicat, marqué par une crise financière internationale aigue, qui est venue s'ajouter à la crise énergétique et à celle des produits alimentaires de première nécessité auxquelles notre monde se trouve confronté. Ce sont là autant de facteurs sensibles qui risquent de rejaillir sur le processus de Monterrey.

La participation du Maroc à cette conférence marque la volonté réelle qui nous anime de poursuivre le processus enclenché par "le Consensus de Monterrey ". Une telle démarche devrait nous permettre de relever les défis majeurs qui interpellent les pays en développement en matière de financement du développement, et ce, par le biais d'actions et d'initiatives rigoureusement définies et adaptées à l'ampleur des enjeux existants.

A cet égard, Je me félicite de l'engagement de tous dans la mise en œuvre du Consensus de Monterrey, ceci d'autant plus que des progrès tangibles ont été réalisés concernant le niveau d'engagement des pays en développement dans les réformes de leurs politiques macroéconomiques, et dans l'instauration d'un environnement national propice à l'investissement.

De même, des efforts louables ont été entrepris au niveau international, par les bailleurs de fonds, notamment en ce qui concerne l'aide publique au développement, et la nécessité d'en accroître l'efficacité, ainsi que l'allégement de la dette extérieure des pays pauvres les plus endettés.

Néanmoins, l'écart demeure important entre les résultats obtenus et les engagements pris, notamment celui en vertu duquel 0,7 pc du PNB devrait être consacré à l'aide publique au développement.

De même, la mise en œuvre du Consensus de Monterrey se trouve confrontée à de nombreux obstacles et autres contraintes, liés notamment à l'endettement, à l'insuffisance des flux financiers et à l'impasse persistante dans les négociations commerciales multilatérales, outre le déficit croissant des balances commerciales et l'augmentation des flux de capitaux en provenance des pays du Sud, à destination des pays développés.

La plupart des pays du monde, et en particulier ceux du Sud, se trouvent désormais dans l'incapacité de suivre ou, du moins, d'influencer le fonctionnement du système financier international actuel. L'on relève, par ailleurs, l'absence d'un système de gouvernance économique et financière qui soit de nature à redresser ces déséquilibres et ces disparités et à refléter, en même temps, le poids croissant des pays du Sud dans l'économie mondiale.

En outre, la flambée des cours des produits agricoles, l'instabilité des prix des produits énergétiques au niveau mondial, ainsi que les retombées des changements climatiques, sont autant de facteurs qui hypothèquent les efforts entrepris par la majorité des pays en développement et pénalisent les ambitions qui les animent pour atteindre les objectifs du Millénaire pour le Développement.

La réunion de haut niveau sur l'Afrique et le Sommet sur les Objectifs du Millénaire pour le développement, qui ont eu lieu en septembre dernier, à New York, ont permis de faire le point sur les étapes franchies en la matière. C'était également l'occasion d'identifier les contraintes inhérentes à la mise en œuvre des objectifs tracés et de définir les mesures à prendre, aux niveaux national et international, pour répondre présent au rendez-vous de 2015.

Bien qu'un certain nombre de pays en développement et de pays à revenu intermédiaire soient en bonne voie d'atteindre nombre de ces objectifs, il persiste encore de fortes disparités entre ces pays et à l'intérieur de chacun d'entre eux.

Aussi appelons-Nous la communauté internationale à prêter toute l'attention requise aux pays les plus pauvres qui ne peuvent se passer de l'aide publique au développement. Nous l'exhortons également à œuvrer de sorte que les pays à revenu intermédiaire puissent continuer à bénéficier du soutien des pays donateurs et des institutions financières internationales.

La situation qui prévaut dans le continent africain, ne cesse, quant à elle, d'interpeller l'ensemble de la communauté internationale. Car, malgré les mesures audacieuses prises par la plupart des Etats africains pour libéraliser l'économie, instaurer la bonne gouvernance et conforter l'Etat de droit, ceux-ci ne seront toujours pas en mesure de réaliser leurs objectifs de développement, si leurs partenaires ne leur apportent pas un appui conséquent en la matière.

Monsieur le Président,.

Le Maroc ne peut que partager le vœu des pays en développement pour que la communauté internationale saisisse l'opportunité qui nous est offerte aujourd'hui, afin de prendre des décisions cruciales visant à donner un nouvel élan à la mise en œuvre du Consensus de Monterrey et à renforcer la coopération internationale pour le développement, le but ultime étant de relever les défis présents et futurs qui se posent en la matière.

Du haut de cette tribune, Nous appelons, donc, la communauté internationale à établir une feuille de route précise qui prenne en considération les enjeux actuels et les défis à venir.

A cet égard, il importe d'œuvrer à une relance des flux d'aide au développement, de sorte à les hisser au niveau fixé par la communauté internationale. Il convient aussi de rehausser la qualité de cette aide et d'en améliorer l'efficacité et la prévisibilité, en renforçant l'appropriation nationale qui en est faite, à la lumière des priorités des pays bénéficiaires et conformément à la Déclaration de Paris et du Programme d'Action d'Accra.

Il est tout aussi nécessaire d'adopter les instruments nécessaires afin de trouver des sources innovantes de financement, et de veiller au suivi et à la mise en Aœuvre des initiatives lancées depuis 2006, outre l'impératif d'alléger le fardeau de la dette supporté par les pays en développement et les pays à revenu intermédiaire.

Parallèlement, Nous appelons tous les pays, particulièrement les pays développés, à faire preuve de flexibilité pour mener à terme les négociations commerciales multilatérales. Nous les engageons aussi à entamer une réforme globale du système financier international, de manière à permettre aux pays en développement de s'associer à la conception des politiques financières, et à renforcer le rô le qu'ils jouent au sein des institutions financières internationales.

Monsieur le Président,.

Dans le cadre des efforts qu'il déploie pour mettre en œuvre les objectifs de Monterrey, le Royaume du Maroc n'a ménagé, pour sa part, aucun effort pour concrétiser les engagements pris à cet effet. Nous avons ainsi réalisé des progrès significatifs en la matière, à travers d'importantes réformes engagées au niveau de notre politique macroéconomique.

En effet, le Royaume du Maroc s'est engagé, depuis le début des années 80, dans un processus continu de réformes structurelles et sectorielles. Parallèlement à cela, il y a eu l'adoption d'une politique économique et financière visant à assurer les conditions nécessaires à l'avènement d'une croissance économique forte, saine et durable, permettant la réalisation des objectifs de Développement du Millénaire.

Nous sommes soucieux d'aller de l'avant dans cette entreprise de réforme en lançant une nouvelle génération de réformes économiques et sociales. Nous nous attachons, en même temps, à poursuivre la consolidation de l'édifice démocratique de notre pays, à conforter l'Etat de droit et à appliquer les règles de bonne gouvernance dans tous les domaines.

Si Nous avons pu entreprendre et mener à bonne fin ces réformes, c'est bien grâce à une gestion rationnelle de nos ressources et à la stimulation de l'investissement productif dans notre pays.

Concernant la gestion de la dette publique, la stratégie du Maroc a été de substituer l'endettement intérieur à l'endettement extérieur, le but étant de minimiser la vulnérabilité des finances publiques face aux fluctuations des marchés financiers internationaux.

Afin de promouvoir la bonne gouvernance et d'insuffler plus de dynamisme à l'activité économique du pays, la réforme du système fiscal, y compris la modernisation de l'administration fiscale, a permis de réaliser, au cours des dernières années, de bonnes performances en matière de recettes fiscales.

Le Royaume du Maroc, qui poursuit sa politique d'ouverture économique et commerciale, soutient le système commercial multilatéral. Outre l'action qu'il mène dans le cadre de la diversification et de la multiplication des opportunités offertes en la matière, afin de moderniser son cadre juridique commercial, et de mettre en place un meilleur environnement des affaires, il s'emploie à la mise en œuvre de plusieurs accords de libre échange, notamment ceux qu'il a conclus avec ses principaux partenaires.

Concernant son engagement à concrétiser les objectifs du Millénaire pour le Développement, le Maroc a été en mesure d'en réaliser un grand nombre, notamment ceux liés à la promotion du développement humain, à l'amélioration de la situation sociale et sanitaire des populations démunies, et à la mise en place des infrastructures de base.

Dans ce cadre, l'Initiative Nationale pour le Développement Humain, que Nous avons lancée en mai 2005, forte d'une approche de proximité et de suivi, a commencé à produire les résultats escomptés, à savoir la volonté de mettre fin à la pauvreté et à la précarité, en milieu urbain et rural, l'amélioration des conditions de vie des populations et la réalisation d'un équilibre régional et local, en matière de politique de développement.

Cependant, et malgré d'importants acquis engrangés dans ce domaine, le Royaume du Maroc reste confronté à des défis majeurs, notamment les risques de ralentissement de la croissance économique, la vulnérabilité aux aléas climatiques, et l'insuffisance relative des indicateurs sociaux du pays en matière d'éducation, de santé et d'emploi.

Si le chemin à parcourir reste long, la volonté du Maroc n'en est pas moins ferme pour gagner les paris du développement durable, dans le cadre d'une solidarité agissante envers les pays du Sud et d'une coopération fructueuse avec les pays du Nord.

Monsieur le Président,. Majestés, Altesses, Excellences,. Mesdames et Messieurs,.

Le Royaume du Maroc exprime son engagement fort à appliquer les dispositions de la déclaration finale, issue de cette conférence d'évaluation, et à leur accorder la place qu'elles méritent dans le cadre de sa stratégie de développement nationale. Il entend ainsi apporter son concours à l'effort de solidarité internationale et œuvrer à la dynamisation du processus de développement qu'il connaît, et ce, dans l'intérêt compris des générations présentes et à venir.

Wassalamou alaikoum wa rahmatoullahi wabarakatouh".